Udine, 07 avril 2012
Une invitation à un mariage en Italie força ma femme, mon
fils et moi, à organiser 10 jours de vacances dans un pays que je n’avais
encore jamais visité.
Ce que ma femme ne savait pas encore c’est que cela
avait également débloqué un mot dans mon esprit : calcio.
Ce championnat jadis le plus regardé et surveillé au
monde conservait toujours un attrait non négligeable à mes yeux. Un rapide
regard croisé sur les dates et le lieu de notre séjour ainsi que sur le
calendrier des séries A et B (les 2 divisions professionnelles italiennes) me
permis de sélectionner deux candidats à ma venue : le stadio Friuli
d’Udine pour le premier weekend et le stadio Marc Angelo Bentegodi de Vérone
pour le milieu de semaine suivante.
Le jour du départ approchant, je me penchai sur les horaires
exacts des matchs pour déterminer comment baptiser footbalistiquement mon cher
fils. La première rencontre devait se dérouler le samedi après-midi tandis que
la deuxième avait lieu le mardi soir suivant.
La décision fut évidente, on se déplacera en famille à
Udine mais j’irai seul découvrir Vérone en nocturne.
L’étape suivante consistait à obtenir les billets. Un
coup d’œil rapide aux affluences moyennes des deux clubs recevant (bien
inférieures à la capacité de leurs stades respectifs) aurait du me permettre de
ne pas paniquer et d’attendre sereinement d’acheter mes billets le jour du
match aux portes du stade. Malheureusement, je ne jetais pas ce coup d’œil.
Les sites internet des deux clubs, l’Udinese et le
Chievo Verone ne vendent aucun billet en ligne, préférant conserver les
traditions ancestrales de la vente unique aux guichets du stade.
Je fus alors contraint de passer par un organisme
indépendant spécialisé dans la réservation de billets pour divers évènements
sportifs. Moyennant une certaine majoration sur le prix original du billet
désiré, ils s’occupent pour vous de dénicher les billets souhaités et de les
mettre en attente là où vous le désirez (stade, hôtel…).
Le service fut ici très efficacement rempli. Dans les
deux cas, les billets m’attendaient là où on l’avait décidé et ils furent même
très aimables lorsque je compliquai ma demande en voulant introduire un enfant
de moins d’un an dans un stade…
Les préliminaires remplis, nous voici en famille sur
la route d’Udine pour le premier jour des vacances, dans notre belle voiture de
location italienne (une Lancia, pas une Lamborghini…).
Une brève visite du centre ville était prévue avant de
s’orienter vers le stadio Friuli mais une faille dans notre organisation avec notre bambino nous
fit prendre du retard et nous poussa à ne voir d’Udine que son stade.
Quoique, affirmer l’avoir vu semble légèrement
exagéré, l’apercevoir semble étymologiquement être plus correct. Je m’explique.
Depuis notre atterrissage sur la piste de l’aéroport
de Venise la veille au soir, nous n’avions vu sur le pare-brise de notre
voiture, que de l’eau. Il pleuvait en continu, d’une manière suffisamment
violente pour vous faire regretter la vie à Londres…
Bien entendu, la situation s’aggrava à l’approche du
coup d’envoi. Je courrai récupérer les billets au guichet « invités »
comme convenu avec l’entremetteur, avant de devoir nourrir toute la famille
sans sortir de la voiture.
C’est équipés de vêtement perméables et uniquement d’un
petit parapluie pour trois que nous prenions la direction de notre tribune,
bien entendu non couverte. Notre progéniture était de loin la plus heureuse,
installée contre sa maman dans une écharpe de portage et enfermé sous l’épais
manteau de celle-ci, notre bébé ne craignait ni le froid ni la pluie. Il se
sentait même tellement bien qu’il n’ouvra pas l’œil une seule seconde pendant
toute la durée de notre présence dans l’enceinte.
L’accès au stade se fit aisément mais pas sans
surprise. Un premier filtrage consistait à vérifier l’identité des entrants. En
effet, chaque billet étant nominatif, une ligne de stadiers était employée à
vérifier scrupuleusement les papiers d’identité de tous les spectateurs.
Le second filtre, plus traditionnel, consistant en la
vérification de la tribune sélectionnée et d’une fouille plus ou moins efficace
était quant à lui inexistant.
La grosse boule de 7kg masquée sous le manteau de ma
femme ne fut pas examinée, pas plus que son épais sac à main, et une fois passé
le portillon de vérification du code barre imprimé sur notre billet, nous
avions tout loisir de choisir notre emplacement, à l’exception bien entendu de
la tribune présidentielle (la seule bénéficiant d’une petite toiture dans le
stade).
Les conditions climatiques ne s’améliorant pas, la
couverture grise semblant s’installer de plus en plus bas dans le ciel italien,
nous prîmes la décision de vivre l’avant match dans les coursives, à l’abri
sous les escaliers de béton.
Femme et enfant décidèrent de rester abrités lorsque
le match débuta alors que je pris place sur un siège mouillé pour assister au
spectacle.
Mon premier coup d’œil fut pour les deux virages.
La curva nord réservée aux supporters locaux était assez
remplie et très colorée grâce à la mise en place involontaire d’un petit tifo
parapluies à l’effet sympathique. Le noyau dur des ultras en bas de ce virage
semblait contenir une centaine de membres actifs mais peu bruyants.
De l’autre coté, la curva sud allouée aux visiteurs
venus de Parme, était particulièrement vide, avec au grand maximum 30 ultras
positionnés en haut du virage avec un désert de gradins en béton autour d’eux.
La rencontre avait alors débuté et s’avérait être d’un
très pauvre niveau technique, en partie à cause de l’état du terrain, inondé,
qui décidait à sa convenance d’accélérer ou de freiner violement la course du
ballon.
En dehors des cris d’extase de tous les italiens qui
découvrent la présence d’un « picolo bambino » sous le manteau de ma
femme, 2 faits vinrent égayer cette première période.
Tout d’abord, la particularité italienne faisant que
durant le weekend de Pâques, toute activité sportive ou commerciale était
bannie, obligeant l’ensemble des matchs à se dérouler ce samedi après-midi à la
même heure.
L’Udinese étant à ce moment de la saison en chasse
pour la troisième et dernière place qualificative pour la prochaine ligue des
champions avec 4 autres clubs. L’écran géant (un seul et unique, au dessus de
la tribune visiteur) affichait l’évolution des scores sur les autres pelouses
et les supporters locaux accueillaient avec de grands cris de joie les buts
inscrits par les adversaires des clubs avec qui ils étaient en lute.
Ensuite, malgré le niveau de jeu atroce exhibé sur la
pelouse, un léger grondement se faisait entendre à chaque fois qu’un joueur
local se trouvait en possession du ballon. Je profitai de la présence
temporaire à mes cotés, sous une pluie de plus en plus gênante, de ma famille
pour leur expliquer que le joueur en question était la légende locale, Antonio
Di Natale.
Celui-ci était chaque année le meilleur buteur du club
depuis qu’il l’avait rejoint en 2004 et avait comblé les supporters en refusant à
maintes reprises les offres alléchantes de clubs italiens bien plus huppés.
Dès l’entame des arrêts de jeu de la première
mi-temps, désabusé par l’humidité de mon corps tout entier, je rejoignis femme
et enfant dans les coursives pour proposer de battre en retraite et
d’interrompre cette tentative idiote de tomber malade dès le début de nos
vacances.
J’eus juste le temps d’entendre le stade se lever pour
l’ouverture du score par le ghanéen Asamoah (encore un) avant de rejoindre notre
voiture, à l’abri de la pluie, du vend et du froid.
Ce n’est qu’une fois de retour à notre appartement, en
regardant les informations sur le télétexte (si, ça existe encore !) que
je sus le score final (3 buts à un en faveur de l’Udinese) et que j’appris que
Saint Antonio d’Udine en avait profité pour inscrire son vingtième but de la
saison de fort belle manière.
En
conclusion, après seulement 45 minutes inconfortables, à observer un match de
bas niveau avec des tribunes à moitié vides et sans ambiance, je peux
considérer ma première expérience italienne comme relativement mauvaise.
Heureusement une chance était donnée au calcio de se racheter rapidement à mes
yeux…
Elle est bien sympa ta femme d encaisser ça avec toi...
RépondreSupprimerVite, la suite!