Bienvenue!

Bienvenue à tous sur mon petit cahier numérique, un peu autobiographique, au cours duquel je vais vous décrire certaines journées de mon existence. Le seul point commun entre toutes ces journées: ma présence dans un stade.


Bonne lecture et n'hésitez pas à me commenter et/ou me contacter!

jeudi 13 août 2015

Ennui estival



Les mois de juin et de juillet d’une année impaire sont très calmes pour tout amateur de football. Aucune compétition vraiment intéressante à se mettre sous la dent. En 2015, on a par exemple dû se contenter de la Copa America et du championnat d’Europe espoir pour le début de l’été, rien de très alléchant ni de très accessible…
Alors on s’intéresse aux petites choses, les transferts bien sur, les matchs amicaux éventuellement, mais l’excitation de la compétition fait cruellement défaut. Du coup, en ce lundi 22 juin, je jette un œil au tirage au sort des tours préliminaires de l’Europa League et de la Champions League. Les clubs sérieux n’apparaitront que dans 3 ou 4 tours, mais lire les noms des équipes engagées dans ce premier tour qualificatif me permet de réviser avec plaisir ma carte de l’Europe.
Ma boulimie géographique est interrompue lorsque je vois le nom de West Ham United inscrit parmi les participants au premier tour de qualification pour l’Europa League. Après recherche, il s’avère que leur présence est due à un cadeau fait par l’UEFA au club le plus fair-play des 3 associations les plus fair-play de la saison précédente. Les hollandais du Go Ahead Eagles et les irlandais de l’University College Dublin sont les autres heureux élus pour la saison à venir.
Mon intérêt a alors soudainement grandi, surtout quand je découvris que les londoniens seraient opposés à un club andorran, les Lusitanos d’Andorre. Evidemment, la possibilité d’aller voir cette rencontre se déroulant à moins de 3h de route de Toulouse me traverse l’esprit. En attendant que la date et le lieu exact soient fixés, je renvoie mon attention vers les rumeurs de transfert les plus folles.

  
L'entrée du stade municipal

Jeudi 9 juillet 2015 à 20h00, au stade municipal d’Andorre. Le lieu et la date fixés, il fallait s’inquiéter de l’obtention de billets. Je ne doutais pas qu’un déplacement dans un recoin ensoleillé en pleine saison estivale allait intéresser un certain nombre de fans anglais. En premier lieu, je cherche des informations sur le stade : la capacité officielle est de 1800 places pour l’ancien stade de l’équipe d’Andorre, jusqu’à la récente création d’un ‘estadi national’.
Le club des Lusitanos n’a pas de site internet ni de numéro de téléphone pour obtenir des informations sur la mise en vente des billets… Les médias locaux ne m’aidant pas plus, je décide de partir à l’aventure tout seul sans billet. Les 3 heures de routes depuis Toulouse via Pamiers passent rapidement, notamment grâce à la beauté des paysages pyrénéens, enfin surtout une fois la frontière andorrane passée…
Sur place, impossible de rater le stade, les pylônes de l’éclairage sont bien visibles, en bord de l’axe principal menant vers l’Espagne. Au cas où ça ne suffisait pas, j’aurais été alerté par un attroupement typique de fans à l’extérieur du pub le plus proche du stade avant une rencontre. Le bar ‘L’estadi’ débordait de supporters anglais avec leur verre de bière à la main.
Une heure avant le coup d’envoi, j’arrivais à me garer (légalement) derrière ce bar, soit à moins de 50m de la grille du stade, un record personnel.


 L'estadi communal vide

La mission consistait maintenant à trouver un billet pour le match à venir. Les quelques centaines de maillots bordeaux navigant autour du bar n’étaient pas là pour me rassurer. Je passe devant un petit kiosque faisant office de billetterie, mais le trouve fermé avec un message indiquant dans un catalan tout juste compréhensible qu’il n’y avait plus de billets à vendre.
Le stress d’avoir effectué cette longue route pour rien apparu soudainement. Certes je me doutais que je n’aurais pas beaucoup de mal à racheter un billet à un local, mais je n’aime pas les mauvaises surprises.
J’allais alors naïvement demander à la personne présente à l’entrée du stade s’il savait où je pouvais me procurer un ticket pour la rencontre du soir. Mon espagnol approximatif sembla suffisant puisqu’il me demanda à son tour « Ingles o Andorran ? ». Un réflexe épatant me fit répondre « Andorran » sans réfléchir, ce qui eut pour conséquence de voir le portillon s’ouvrir et le langage corporel de l’officiel m’indiquer d’entrer. Simplement, sans paiement, sans billet, sans rien. « Muchas gracias señor ! ».
Ma première analyse, une fois à l’intérieur de l’enceinte municipale, repère une belle pelouse, une piste d’athlétisme (hélas !), 2 tribunes, une « présidentielle » d’une dizaine de rangée et une « visiteurs » dans un virage. Celle-ci est remplie de drapeaux des différents fans clubs du club londonien, et à l’air, de communiquer avec le pub à l’extérieur, où se trouvent tous les fans pour le moment.
La tribune principale est elle encore vide à l’exception de son extrémité où siègent les officiels de l’UEFA, les journalistes (The Sun et The Daily Mail ont été repérés), le staff de West Ham, ainsi que leurs très nombreux ordinateurs et caméras.
Le côté opposé du terrain est quant à lui composé d’un mur taillé dans la roche surplombé par le grillage du camping municipal depuis lequel la vue semble parfaite et gratuite.
Pour patienter plus facilement maintenant que je suis bloqué à l’intérieur du stade, je me dirige vers la buvette et me rends compte que je n’ai que 4€ de monnaie avec moi. Juste assez pour un paquet de chips et une bière sans alcool, pendant que les visiteurs ont accès aux joies du pub juste derrière leur tribune…
 
L'estadi communal plein

L’arrivée des joueurs pour l’échauffement devait me permettre de faire un point sur l’effectif de West Ham pour la saison à venir. Sauf qu’en étant à 6 semaines du début de la seule compétition qui compte aux yeux de leurs dirigeants, la Premier League, peu de joueurs de l’équipe type ont été invités à effectuer ce déplacement. En effet, seuls 3 joueurs présents sur la feuille de match à Andorre démarreront le premier match de championnat de la saison à l’Emirates Stadium.
En ce qui concerne la reconnaissance faciale, et bien que les joueurs s’échauffent à moins de 10 mètres de moi, seule un visage me semble familier, celui de l’ex-sedanais, ex-lorientais et ex-marseillais, Morgan Amalfitano. La lecture de la feuille de match abandonnée par un membre du staff londonien m’appris que je connaissais deux autres joueurs par leur nom : l’ancien messin Diafra Sakho et le capitaine du soir James Tomkins.
Le reste de l’équipe était composée de jeunes joueurs ou d’éternels réservistes, ce qui n’augurait rien de bon pour la saison à venir de Monsieur Amalfitano. La lecture des numéros des joueurs remplaçants était particulièrement significative : 32, 34 41, 51, 59, 62 et 64. Certes la numérotation des maillots est bien plus libre aujourd’hui qu’au siècle précédent, mais cette série de nombre semble tout de même bien prouver la jeunesse de l’effectif mis à disposition pour ce premier tour qualificatif.

Télévision locale

La différence de standard entre les deux effectifs a d’abord semblé évidente durant l’échauffement. 1 entraineur, 5 ballons et 6 plots présents sur la moitié de terrain lusitanienne, 6 techniciens, et toutes sortes d’équipements mis à leur disposition côté britannique. L’esprit meilleure ligue du monde contre district était parfaitement mis en avant.
A l’heure du coup d’envoi, les fans britanniques avaient (presque) tous rejoint leur tribune et démarrèrent leurs chants répétitifs. Coté local, la tribune était finalement assez remplie et une poignée de supporters à tendance ultra des montagnes se faisait entendre à l’aide de leur tambour.

Ultras Andorrans

La rencontre avait commencé depuis quelques secondes seulement que chaque équipe avait déjà montré quel serait son mode d’expression pour la soirée. Une technique aisée accompagnée d’une condition physique pitoyable pour les visiteurs, une technique hésitante mais un engagement physique indéniable pour les andorrans.
Ce cliché des trentenaires rondouillards se frottant aux adolescents en manque d’expérience fut parfaitement illustré à la 14e minute lorsqu’à plus de 50m du ballon l’andorran nommé San Nicolas se permis de provoquer verbalement et de mettre une petite tape derrière la tête du numéro 15 londonien Diafra Sakho. Celui-ci réagit avec trop de zèle, se retournant et poussant son adversaire. Le quatuor arbitral danois décidait d’avertir le provocateur et d’expulser le provoqué…
En supériorité numérique, les lusitaniens allaient-ils pouvoir remonter le handicap de 3 buts concédé au match aller ? A la 21e minute, le jeune Elliot Lee poussait le ballon dans le but andorran, rendant la mission impossible pour les joueurs de la principauté. Le reste de la rencontre sera d’un ennui remarquable, les anglais faisant tourner la balle sans se fatiguer et sans prendre de risque, les andorrans n’ayant pas les moyens de les en empêcher.
Le quart d’heure de pause permis tout de même de se divertir en observant les quelques visiteurs qui avaient mal réagi au mélange de bière et de soleil d’été et qui tentèrent de jouer avec la sécurité locale qui gérait la situation avec beaucoup de calme.

Célébration après l'ouverture du score

1-0 score final, si le déplacement et la visite ont été agréables, la rencontre avait été sans intérêt méritant le qualificatif d’ennui estival.

Pour info, je vais virtuellement effectuer le parcours m'emmenant d'Andorre à la finale 2016 de l'Europa League à Bâle en passant par tous les vainqueurs successifs du Lusitanos Andorre (mise à jour après chaque tirage au sort):


Road to Basel 2016 :


1er tour préliminaire:

West Ham (Ang) – Lusitans (And) 3-0                                  2268km

Lusitans (And) – West Ham (Ang) 0-1                                  368km (2638km)


2e tour préliminaire:
West Ham (Ang) – Birkirkara FC (Mal) 1-0                       2268km (4904km)
Birkirkara FC (Mal) – West Ham (Ang) 1-0 (3-5)             4552km (9456km)
3e tour préliminaire:
West Ham (Ang) – Astra Giurgiu (Rou) 2-2                       2268km (11724km)
Astra Giurgiu (Rou) – West Ham (Ang) 2-1                       4918km (16642km)
Barrage:
Astra Giurgiu (Rou) – AZ Alkmaar (PB) 3-2                     4918km (21560km)
AZ Alkmaar (PB) - Astra Giurgiu (Rou) 2-0                      2428km (23988km)
Groupe L
Partizan Belgrade (Ser) - AZ Alkmaar (PB) 3-2               3764km (27752km)
Augsburg (All) - Partizan Belgrade (Ser)                          2472km (30224km)


 

vendredi 19 juin 2015

Le match de 5 jours


            Parce que je me devais de m’intéresser à la culture sportive anglaise et que celle-ci ne se limite pas au football et au rugby, j’avais envisagé depuis un moment d’entraîner ma compagne dans une virée vers un des deux grands stades de cricket de Londres.
            Ce sport crée à la même époque que ce qui n’était alors qu’un mélange de jeu au pied à onze et de jeu à la main à quinze, est très populaire en Angleterre et dans les anciennes colonies britanniques. Il s’agit même du sport collectif préféré au sein de l’élite bourgeoise du pays ainsi qu'au sein de la très large communauté indo-pakistanaise.
Les dernières pages dédiées au sport dans les quotidiens font quasiment autant de place au cricket qu’au football quand la saison des cricketeurs est ouverte.
            Car oui, étant imprégné de noblesse et de dignité, ce sport se pratiquait jusqu’à peu uniquement en tenue blanche qu’il ne fallait pas salir. D’où une saison réduite aux quelques mois de ce qui au Royaume-Uni se fait appeler, avec grande exagération, l’été.
           
            Ma curiosité (voire mon autisme) m’avait déjà poussé à découvrir ce sport bien plus en profondeur que ce qu’on pouvait logiquement espérer d’un continental.
            Par conséquent, je savais qu’il me fallait obtenir des sésames pour un test match international afin de découvrir le monde du cricket par la grande porte.

            Lords et The Oval étaient les deux stades candidats à ma venue. Le premier cité se situait tout près de mon habitation à Baker Street et était également le berceau de ce sport, siège de la fédération nationale et du musée du cricket. Le second, situé au sud de la Tamise avait pour particularité d’avoir la forme géométrique que lui confère son nom lorsqu’on l’observe depuis les cieux.

The Oval.

            La première bonne occasion me fit investir dans une paire de tickets pour emmener ma dulcinée découvrir ce sport lors d’une journée de test match estival opposant l’Angleterre à l’Inde à The Oval. La première découverte, avant même de se diriger vers le stade, fût la gestion temporelle d’un tel match.
            Les sésames indiquaient une ouverture des portes à 9h00 pour un début des hostilités prévu 30 minutes plus tard. Très matinal pour une rencontre sportive me direz-vous… La particularité était ici qu’il n’y avait pas de durée précise pour la rencontre, la journée s’achevait quand les juges arbitres (« umpires ») décidaient qu’il faisait trop sombre, ou qu’ils étaient trop fatigués ou que leur programme télé favori allait bientôt commencer.
            Généralement, cela conduit à une présence possible d’une douzaine d’heures au stade pour ce type de rencontre, sauf que les cricketeurs professionnels eux, ne jouent pas pendant tout ce temps. Une pause de plus d’une heure leur est accordée à midi (en plein match et quelque soit la situation sur le terrain) de même qu’une seconde, quand l’horaire du traditionnel tea-time britannique sonne.
            Les tests matchs n’ayant lieu qu’entre anciennes colonies britanniques, tout le monde est soumis à cette règle imposant deux coupures dans une longue journée de travail, y compris lors d’un Bangladesh – Indes Orientales (véritable nation dans le monde du cricket, regroupant plusieurs iles caribéennes).
            L’ultime spécificité temporelle concerne la durée globale d’une rencontre. En effet, un test match correspond à cinq journées consécutives telles que décrites précédemment, généralement du jeudi au lundi suivant (et encore cette limitation ne fut mise en place qu’après des décennies de tests à la durée indéterminée).

            Notre visite concernait la troisième des cinq journées consacrées à ce test et d’après les spécialistes, ce matin là, l’Inde semblait en position très favorable pour remporter ce test ou au moins obtenir un match nul (score qui représente plus de la moitié des issues de tests matchs). Les cricketeurs semblent donc incapables de se départager, même après cinq jours d’efforts…

            Le principe général a inspiré (et non pas l’inverse) celui du base-ball américain. Les équipes défendent et attaquent tour à tour en s’installant au lancer ou à la batte (à la section rectangulaire plutôt que ronde de l’autre coté de l’Atlantique).

Cricket vs baseball.

            Voici les principales différences :
  • Le terrain a une forme entièrement ronde, les batteurs et lanceurs ce situant au centre de celui-ci,
  • Il est donc autorisé de frapper la balle vers l’arrière, en l’effleurant ou la déviant grâce aux particularités géométriques de la batte,
  • Le lanceur se doit de conserver le bras tendu lors de son jet (essayez, ce n’est pas inné comme geste),
  • Le batteur ne doit pas juste frapper la balle quand il en a envie, il doit en fait protéger des quilles situées juste derrière lui,
  • La balle lancée doit impérativement rebondir (multipliant les effets donnés à la trajectoire de celle-ci) avant d’être batée ou de percuter les quilles (« wickets »),
  • L’attaquant ne marque pas de points en courant en cercle mais en effectuant des allers-retours entre les deux positions autorisées pour battre,

Etc, etc… Mais vous en savez déjà assez pour ne pas avoir l’air complètement perdu lors de votre prochain passage estival dans un pub anglais.

            Ce jour là, assis en tribunes avant le début des hostilités, je tentais d’expliquer les règles de base à Alexia lorsque nos voisins pour la journée arrivèrent.
            Un père de famille anglais accompagné de son fils d’une dizaine d’année allait éclairer ma faible lanterne lors de situations de jeu incompréhensibles. Ils allaient également nous faire découvrir la « culture » du cricket.
            Cette culture qui consiste à apprécier autant les phases de jeu que les phases sans jeu où l’on file au bar se ravitailler en boisson houblonnée (même quand on a dix ans). Pour eux, cela ressemblait à une journée au parc, avec divertissement intermittent fourni.
            La journée débutait, les batteurs battaient, les lanceurs lançaient et les autres attrapaient la balle avant de la relancer (vous voyez la métaphore avec la journée au parc en compagnie du chien?).

            Cela semblait relativement agréable pour un sportif curieux tel que moi, peut-être un peu moins pour ma compagne. Car il faut bien l’avouer, les raisons de s’enflammer sont tout de même bien rares, Un grand coup de batte par ci, par là, un bel arrêt au vol toutes les deux ou trois heures et puis c’est tout !

            Une « standing ovation » eu tout de même lieu lorsqu’un petit indien à l’allure timide pénétra dans l’enceinte. Ce petit homme s’appelait Sachin Tendulkar et j’avais pu lire dans un petit livre d’initiation au cricket que sa seule apparition sur un terrain suffisait à électriser la foule. Cet homme, s’il avait été footballeur aurait été Pelé, Maradona, Zidane et Messi réunis.
            Le type est simplement une légende du sport, détenteur de quasiment tous les records individuels que l’on a pu imaginer à propos de ce sport. Né en 1973, il poursuit toujours sa carrière professionnelle et est de très loin le cricketeur le plus riche du monde grâce à une multitude de contrats publicitaires sur le gigantesque marché indien.

Sachin Tendulkar.

            Pour ce qui est du match en lui-même, pas grand-chose ne me reste en mémoire. L'Angleterre allait éviter de justesse la défaite et semblait s'engager vers un match nul sur lequel tout le monde aurait pu finalement parier... Lorsqu'effectivement le soleil passa derrière l'horizon, les "umpires" décidèrent que s'en était assez pour aujourd'hui, renvoyant tout le monde à la maison. On remercia chaleureusement nos voisins pour ce nouveau cours dédié à commun devenir un britannique comme un autre, avant de se retourner vers la station de métro au même nom que le stade.


            Si pour nous supporters et curieux, tout s'arrêtait là, ce n'était pas le cas pour les joueurs puisqu'il leur restait alors deux jours de boulot pour conclure cette rencontre amicale, ce match de 5 jours...